La laïcité n’est pas une spiritualité
En France, la laïcité puise une bonne part de ses sources à la Révolution française et s’ancre dans la Constitution française au sortir de la deuxième guerre mondiale. L’un des points essentiels à son propos, telle qu’elle est aujourd’hui considérée du point de vue du droit et non de celui des acteurs sociaux et de tout un chacun, est qu’elle constitue un cadre garantissant la possibilité à tout citoyen de croire ce qu’il souhaite, d’être convaincu par ce que bon lui semble, de vivre ses croyances et convictions et de les exprimer, le cas échéant sous la forme d’un culte.
La limite posée à cela est bien entendu celle de l’ordre public, étant entendu qu’il ne viendrait à l’esprit de personne de perturber les consciences en agissant dans un sens opposé au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité, à la salubrité publiques et à la dignité de la personne humaine.
La liberté de conscience au cœur de la laïcité
Croire ce que nous souhaitons (et pouvoir l’exprimer comme bon nous semble dans les limites définies par la loi) nous paraît dorénavant presque naturel, à tout le moins banal. Nous rappellerons toutefois ici que la liberté de conscience est un droit qui, encore de nos jours, ne fait pas l’unanimité sur l’ensemble de la planète Terre et qu’il a été et est encore combattu par des autorités religieuses et/ou des Etats, comme le rappelle notamment Dominique Avon dans l’introduction de son ouvrage de référence récent consacré à cette notion.
Quoi qu’il en soit, la laïcité implique aujourd’hui, comme le rappelle à juste titre la charte de la laïcité de la branche famille avec ses partenaires de la Caisse Nationale des Allocations Familiales, le rejet de toute violence et de toute discrimination raciale, culturelle, sociale et religieuse.
Nous pouvons être chrétien et laïque, musulman et laïque, juif et laïque, sikh et laïque, bouddhiste et laïque, athée et laïque, rastafarien et laïque, agnostique et laïque, etc… comme le rappelle à juste titre l’association Coexister dans cette vidéo. Nous n’avons en fait – et en droit ! – pas le choix du cadre, mais au sein de ce cadre, avons, en principe, le choix d’adhérer aux options spirituelles qui nous correspondent.
C’est la République qui est laïque, pas la France, ni les Français
La société française en elle-même n’est donc pas laïque car elle est composée de citoyens qui ne le sont pas. La laïcité n’est pas une qualité de la société mais constitue un cadre républicain permettant d’agir et d’interagir avec autrui, à la fois semblable et différent de nous, ayant ou non les mêmes croyances et convictions, notamment du point de vue spirituel et religieux.
Référence commune à tous les citoyens, la laïcité n’est donc pas une opinion parmi d’autres. Comme le rappelle notamment l’Observatoire de la laïcité, ce n’est pas une conviction mais le principe autorisant toutes les convictions et leurs expressions, sous réserve du respect de l’ordre public. Se portant garant de la liberté de conscience de chaque citoyen, de laquelle découle la liberté d’exprimer ses croyances dans la limite de l’ordre public, l’Etat accueille donc a priori toutes les formes de spiritualité, quelles que soient leurs origines (religieuses, athées, agnostiques, areligieuses,…), y compris malheureusement celles pouvant aboutir à un
enfermement, qualifié parfois de sectaire.
Socle de la République, la laïcité permet donc aux citoyens de réaliser des choix spirituels en leur âme et conscience et, s’ils le souhaitent, de les exprimer de manière collective, dans le respect de l’ordre public. Elle constitue ainsi notamment une condition préalable à l’éclosion et à l’expression de leur dimension spirituelle – dimension constitutive de tout être humain.
Pour chaque citoyen, c’est une chance, une ouverture, un appel même pourrions-nous dire, et en aucun cas une restriction.
La laïcité n’est donc pas une spiritualité mais la spiritualité peut s’exprimer grâce à la laïcité.
Une République laïque est une République respectueuse de la spiritualité de chacun.